La mission d'infiltration à Waurhaul s'était bien passée. Mais il y avait des imperfections comme toujours. C'est vrai que sans Hélio, les choses étaient un peu plus difficiles. Même si j'étais belle, même si je savais jouer avec les mots comme avec des armes, il avait cette qualité-là: celle de faire écouter tout le monde. Du parfait imbécile au grand fan d’ingénierie, en passant par des femmes avides de pouvoir comme moi, il remportait tous les suffrages. Parfois à mon plus grand désarroi. Et puis sans Hélio, il fallait tenir le cap de sa recherche. Ne pas oublier que tout ce que l'on fait c'est pour lui et non pas contre lui. Ce qui est bien plus compliqué que les apparences. Il fallait sans cesser se répéter que chaque pas, chaque bouffée d'air respiré n'avait qu'un but: retrouver Hélio. Il fallait le retrouver coûte que coûte. Même si cela voulait dire mettre un peu à mal mes propres plans. Il le fallait. Il fallait garder les apparences sauves, la loyauté bancale intacte. Mes propres idées attendront. De toute façon, elles avaient germé pendant tellement longtemps, qu'elles pourraient bien attendre encore un peu plus. Rien n'était pressé de toute façon. Le premier objectif était de le retrouver, lui, pour que je puisse continuer mes pions en pleine sérénité. Pour que je puisse me concentrer sur ces plans que je me suis fabriquée et que je n'abandonnerai jamais. Donc, la mission d'infiltration s'était bien passée mais toujours aucun signe de Hélio à l'horizon. Pourtant, il devait bien être quelque part, à Miranoir. On avait trouvé son signal, on ne pouvait pas s'être trompé de la sorte. Ce n'était pas possible et je ne voulais pas y croire. La mission de Saturne et Jupiter s'était bien passée mais, il n'y avait qu'un seul hic: ils avaient oublié de me prévenir. Et, règle numéro un: on n'oublie jamais Jupiter. On n'oublie jamais la Commandante. De plus, les erreurs faites inadmissibles. Sûrement faite par la petite vermine qu'est Mars. Elle et sa chevelure rousse me donnaient des envies de meurtre. D'ailleurs, elle venait de se recevoir une claque pour ne pas oublier l'affront fait plus tôt. La claque était partie, légère et avait atterri sur sa joue si pâle. Désolée sweet heart, j'en avais trop envie. Envie de la prendre, envie de la détruire jusqu'à la dernière cellule, cette rousse capricieuse. Le seul problème c'était que Saturne n'avait pas apprécié. Le naïf petit Saturne n'avait pas toléré ma main trop leste. Mais cette dernière avait été inévitable. Il fallait recadrer cette Mars qui ne tenait plus en place, cette Mars qui osait soulever mon autorité. Il fallait l'exterminer. Il fallait la réduire en poussière, l'envoyer six pieds sous terre. Il le fallait. Mais perdre Saturne n'était pas envisageable. En tant que commandant subalterne, il pouvait être une pièce maîtresse. Sa loyauté était une qualité inestimable et personne ne pouvait se permettre de la perdre. Pas même Hélio. Alors dès que j'avais senti le ton de sa voix monter après la fameuse claque, je m'étais collée à lui. Comme un aimant. Usant de ma précieuse salive pour remettre tout en l'ordre. Mais il avait fui sa grande maîtresse, il m'avait fuie pour retrouver Mars l'éplorée. J'étais restée là presque bouche bée devant ce deuxième affront. Préférait-il donc cette fameuse Mars à moi ? Que pouvait-il bien lui trouver ? J'étais restée là une paire de minutes, à me demander ce qu'il pouvait bien en être. Et puis, sa colère redescendra bien assez tôt. Elle redescendra parce qu'elle redescend toujours. Il ne peut pas se passer de moi ce petiot, c'est inévitable. Malgré tout, j'avais décidé de les retrouver. Pas pour Mars mais surtout pour Saturne. Saturne le seul, l'unique, celui dont je ne pouvais pas encore me passer. On ne fait pas l'impasse sur Saturne. Sur Mars par contre, c'était tout à fait possible. En quelques minutes, ils étaient déjà partis assez loin et j'ai dû faire quelques sbires lambda avant de comprendre et de connaître leur nouvelle position: Sakai. Alors j'y suis allée. Et je les ai trouvés. J'ai entendu Mars avant de voir qui ce soit. Elle devait certainement parler à Saturne, comme toujours. "  Ce monde n'est pas le nôtre. " Hmm oui, d'accord si tu veux Mars. Toi tu fais ce que tu veux mais moi je compte bien tout mettre en oeuvre pour que les circonstances déplaisantes de Miranoir deviennent plaisantes justement. Rien n'est parfait à la base mais, on peut le faire devenir. Il suffit que je m'en occupe voilà tout. "  Et ce monde, nous le créerons. Avec ou sans ton accord. Nous créerons ton rêve, c'est ainsi. Parce que c'est ce que tu as fais, de nous. " Ce monde existe déjà ma belle, pas besoin de le créer. Pas besoin de tout faire alors que la base est déjà bonne. Tu es juste totalement incompétente et tu ne vois pas le potentiel de l'endroit. Sombre idiote. J'allais ouvrir la bouche pour la remettre à sa place, comme il le fallait. Mais Mademoiselle Spectrum s'était dit aujourd'hui qu'elle allait tapait la causette. " Parce qu'il subsiste une part d'Hélio dans chacun de nous.  " Cette phrase me fit chavirer. Sûrement le prénom de Hélio qui était prononcé. Parce que cela fait toujours quelque chose. Parce que c'était toujours la main au-dessus du plan, celui à prendre les seules décisions réelles. C'est à ce moment-là que je m'avance vraiment et que je regarde la petite assemblée. Ils étaient trois ici. Mars. Saturne. Et puis Hélio. Hélio. Ma bouche se serre, ce qu'il reste de mon coeur aussi. Il est là. Enfin, j'aurais envie de dire. Un sourire en coin s'affiche sur mon visage. Les bonnes choses allaient enfin commencer. Tout allait se mettre en place tranquillement. On pourrait faire nos plans. On pourrait dominer. Rectification, je pourrais dominer le monde. Je regarde Hélio avec ce regard plein d'ambitions. Ce regard où toutes mes ambitions y brûlent comme un feu ardent. Je soutiens son regard avant de me détourner vers Mars. " Tu ne comprends pas les avantages qu'offre ce lieu Mars. Cultive-toi avant de parler. Mais, maintenant, tout est plus facile puisque tu es là Hélio. " Mon regard se retourne vers Hélio. Il s'y reperd. Parce que son regard à lui laisse miroiter les plus belles ambitions. Il laisse miroiter un avenir. Un avenir de grandeur, un avenir où tout est possible. Où tout m'est possible.