Evangelion détestait les missions dans le désert : écrasée par la chaleur dont elle était peu coutumière, elle supportait mal l’impression d’avaler de la lave à chaque respiration et râlait contre cette transpiration qui la rendait gluante. S’il n’y avait pas eu tous ces Pokémons à préserver, elle n’aurait sans doute jamais mis les pieds dans la moindre étendue sableuse dépourvue de plan d’eau à portée de vue. Seulement, même les résidents des aires chaudes méritaient toute leur attention, aussi se contentait-elle de grimacer quand on l’affectait à la partie désertique de Miranoir, ravalait son dégoût et prenait son courage à bras-le-corps. Ah, parfois, qu’elle maudissait son amour pour ces créatures…

Et, il y avait Moufflair. Son vieil ami avait arpenté avec elle, à plusieurs reprises, l’étendue désertique de l’île ; comme elle, il en connaissait les risques et y avait toujours fait face avec aplomb, mais alors qu’ils cheminaient sur le retour, Evangelion ne pouvait pas ignorer que l’âge l’avait rattrapé. Elle n’avait pas voulu qu’il vienne lorsqu’elle avait préparé son paquetage, mais n’étant pas son dresseur, elle n’avait rien pu faire contre sa décision de l’accompagner ; Cobalt non plus, bien qu’il ait tenté de l’empêcher de sortir de leur maison au moment du départ. Là, il se traînait, la respiration laborieuse et sa queue toute molle retombée sur son dos comme jamais elle n’avait été abandonnée. Evangelion s’inquiétait.

« Nousse ! » Elle leva la tête. Devant elle, Cobalt s’était immobilisé et pointait de sa patte les premiers palmiers de l’oasis providentielle. Revigorée, Evangelion prit une grande inspiration et attrapa Moufflair ; comme chaque fois, elle mit quelques secondes à s’habituer au poids de la créature et surtout à son odeur, mais tint bon. Elle le lui devait bien.

Cobalt était déjà planté devant le plan d’eau lorsqu’elle arriva, à bout de souffle. Aussi précautionneusement que possible, elle posa Moufflair sur la rive et se laissa tomber à côté, cherchant son souffle.

Son répit fut de courte durée lorsqu’elle entendit un bruit étrange derrière elle.

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L’ombre du Pokémon la recouvrait entièrement tant il était gigantesque. Une créature du fond des âges dont l’éclat dans les prunelles trahissait une légère colère comme celle que pique le voisin à qui on a ravi une rose. Evangelion met assez peu de temps à comprendre la raison pour laquelle le Pokémon darde sur elle un regard aussi peu avenant : Cobalt tomba comme une pierre du cou du Tropius, une banane d’un jaune éclatant dans la patte. Evangelion déglutit péniblement. « T’as pas le moindre instinct de survie, Cobalt », lâche-t-elle alors que son Grenousse revient vers elle, presque insouciant. A côté d’elle, Moufflair s’était retourné ; il lâcha un grognement qui, à lui seul, valait toutes les remontrances du monde. Cobalt se figea, regarda Evangelion puis se retourna. Il dû comprendre la situation car il lâcha sa banane et prit une pose suggérant l’apprêt au combat.

« Euh, oui, non, mais non là. Pas que j'ai pas confiance en toi, mais un Pokémon plante contre un eau, j'ai quand même un minimum de restes de leçons. » D’un bras, elle attrapa Cobalt et le retira de la hargne du Tropius rancunier.

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Elle sentait la catastrophe imminente ;  sa précipitation avait écarté de ses préoccupations l’innocence avec laquelle Cobalt appréhendait le monde, comme si celui-ci lui appartenait, en oubliant les susceptibilités d’autrui. Son Grenousse n’était pas méchant, il était juste fondamentalement imprudent. De fait, elle n’aurait jamais dû le perdre de vue en s’enfonçant dans l’oasis, voire ne pas y mettre les pieds ; elle connaissait la réputation des Pokémons de l’endroit, qui toléraient le reste du monde, peu propice à ce que Cobalt s’y balade innocemment.

Et ce qui devait arriver arriva. Provoquer Tropius revenait peu ou prou à déranger le reste de la faune locale. Aussi ne fut-elle pas étonnée de voir un nénuphar ramper hors de l’eau et lever vers elle des yeux froncés. « Au moins, ce n’est pas la même taille… », soupira-t-elle. Evangelion jeta un œil à Moufflair, affalé à côté d’elle. Dans cet état, il était inutile ; et surtout, elle n’avait pas la force de le porter en courant.

Comme sentant que c’était son jour de gloire – symboliquement bien entendu – Cobalt s’avança et se prépara de nouveau. Cette fois, elle n’y échapperait pas. « Ok, il est temps de te rappeler les rudiments du dressage. » En espérant que le Nénupiot oublie qu’il est de type plante. « Cobalt, vive-attaque ! »

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Evangelion n’aimait pas beaucoup les combats Pokémons. Elle prônait la cohabitation pacifique et sa collaboration avec Moufflair lui avait toujours convenu, celui-ci se battant uniquement quand il le voulait sans jamais avoir à obéir à quiconque. Devoir ordonner à un Pokémon de se mettre en danger pour elle la rendait nerveuse, et voir Cobalt lui obéir sans le moindre signe de rébellion n’arrangeait pas son malaise. Elle fut cependant soulagée de le voir réussir son attaque et parvenir à blesser le Nénupiot qui leur faisait face, avant que celui-ci ne les gratifie d’un rugissement qui lui vrilla les oreilles. Elle serra les dents. « Cobalt, de nouveau Vive-attaque ! »

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