Les nuages cotonneux roulaient lentement sur le ciel azurin, elle suivait leur progression et se sentait dériver à leur rythme. Le courant marin emportait doucement son corps. Elle flottait, étendue sur le dos, immobile et les yeux grands ouverts. Sa tête était à moitié submergée, les sons s’étaient tus, dans ce calme silencieux elle n’entendait que la réverbération profonde et rauque du battement de son cœur. Rythme lent et hypnotique. Elle se laissait emporter. Là, pensa-t-elle, était l’illustration parfaite de sa vie, cristallisée en un moment simple et fugace. Ses parents, océanologues, avaient depuis longtemps renié la vie terrestre pour se consacrer entièrement à leur passion. L’exploration, l’étude et la compréhension des océans et de leurs habitants. Ils avaient aménagés un bateau de manière à pouvoir y vivre et effectuer leur recherches, un labateauratoire comme l’aimait à l’appeler Bati lorsqu’elle était jeune. Elle était né à son bord et y avait passé la majeur partie de sa vie. En mouvement permanent, au gré des vents et des découvertes, sans attaches, sans points fixes autres que les ports dans lesquelles on faisait escale quelques jours pour le ravitaillement, sans d’autre compagnie que celle des pokémons marins, parfois des goélises. Une vie où l’étroitesse de la cabine et du pont est compensé par l’immensité infinie des mers sur lesquelles on vogue. Bahati ne s’en plaignait pas, elle avait eu une jeunesse heureuse. Chaque rencontre, certes rapide, était un souvenir cher car unique, chaque lien scellé à la hâte et aussitôt dénoué lors du départ résonnait avec force dans sa mémoire, comme si ces êtres qu’elle avait connu furtivement l’avait accompagné toute sa vie. Elle venait de nulle part et allait toujours ailleurs. Par à-coup, au gré du passage des nuages, le disque doré de l’astre venait réchauffer de ses rayons le corps de Bahati. Elle se souvenait alors de ses longues après-midi qu’elle passait, étendue sur le pont du navire, bercé par la houle, à lire des histoires de pirates et de trésors engloutis dans les fonds marins. Son butin à elle, elle le  gardait dans le coffre de son esprit sous la forme de souvenirs en vrac, tranches d’odeurs, échos de rires. Le sable qui se creuse sous le pas, le sel qui meurtrit les poumons, l’ombre brûlante dans le halo du soleil couchant, le rugissement de l’eau déferlante. Elle ne s’en plaignait donc pas, non, mais avait décidé que Miranoir serait la fin de son voyage. Ou du moins la fin de cette aventure-là et le début d'une nouvelle. La continuation de sa route ne pouvait se faire en mouvement. Lorsque ses parents avaient entendu parler de l’émergence d'une curiosité scientifique aux alentours de l’île, ils s’y étaient précipités. Cela ne faisait pas de doute, dans les eaux avoisinant cette île nouvellement formée il devait y avoir des découvertes océanologiques à faire ! Bahati se réjouissait de l’enthousiasme de ses parents, mais n’y prenait pas part. La seule chose qu’elle ressentait, c’était que sa prochaine étape de son cheminement personnel, elle le savait instinctivement, serait là-bas. L’appel de l’aventure et de la découverte étant aussi changeant que les vents, les Lombard étaient à peine arrivés à Miranoir qu’il fallait investiguer une autre curiosité scientifique quelque part, autre part, partout, tout le temps. Il fallait alors changer de cap. Cela ne faisait rien. A eux de partir et à elle de rester. Ici, Miranoir, c’était le premier port d'attache de sa vie, elle se sentait bizarrement sans repères là où tout était fixe.

Elle vivait dans un état constant de mélancolie. Celle dont on ne souffre pas, celle qui n’est pas agressive, négative, cette sensation d’être constamment sur le point de se rependre en larmes parce que le monde qui nous entoure est trop, un trop merveilleux fait de sons, d’odeurs, de couleurs, de sourires échangés. Une vie est chargée de tant de détails que l’âme seule ne serait contenir. La vie est une énormité surhumaine, une expérience qui, si on la laisse vraiment nous pénétrer, nous détruit, nous transcende. Ce qui intéresse Bahati ce sont les petites choses, et les grandes. Les détails et l’incommensurable. Parce que cela nous dépasse et nous écrase ou nous perds. Elle se souvient alors d’avoir perdu la vie. Pour l’espace de quelques secondes. Elle était jeune. Trop pour avoir conscience de la mesure du temps ( et donc de son âge ). Alors qu’elle plongeait elle s’était retrouvée face à un gouffre sous-marin, une crevasse béante qui ressemblait plus à la gueule géante d’un monstre. Elle avait fixé les ténèbres, maintenant sa position en brassant l’eau. Quelque chose, une force s’exerçant à l’intérieur d’elle-même l’empêchait de se dérober à cette contemplation. Elle avait la sensation que quelque chose de grand, de puissant était tapie là, et elle se laissait consumer. Lorsque ses poumons la heurtèrent et que son corps eu le réflexe mécanique de respirer, elle ne lutta pas. L’eau s’engouffra dans ses voies respiratoires et ne tarda pas à les inonder. L’abysse du gouffre s’étendit alors et l’enroba dans une étreinte froide. Elle avait perdu conscience avant d’entendre son cœur cesser de battre. Elle s’était réveillé sur le pont du bateau, ses parents penchés sur elle, le visage marqué d’effroi et les yeux brillants de délivrance en voyant leur fille reprendre conscience. Son père lui avait dit, après l’incident, qu’un wailord l’avait ramené à la surface sur son dos. On s’était inquiété pour la santé, physique et mentale, de la jeune fille. Qu’est-ce qui avait bien pu se passer sous ‘le grand linceul de la mer’ ? On ne trouva pas de réponse et on finit par ne plus se poser la question après plusieurs années sans incident d’aucune sorte. Pourtant, étendu là dans l’océan qui avait failli lui ravir la vie, Bahati elle comprenait. Ce qu’elle voulait c’était s’oublier, se dissoudre, se diluer, se laisser détruire par quelque chose de plus grand pour se sentir vivre. Dans le ciel, la fréquence d’apparition des nuages avait augmenté. Ils se faisaient de plus en plus gros et de plus en plus gris. L’air s’était rafraîchit et griffait la peau de la baigneuse. Elle s’éveilla de la torpeur introspective dans laquelle elle était plongée et sortis la tête de l’eau. « ‘Plouf ! ’Plouf ! » Bajirao jetait un regard inquiet à sa dresseuse et pointait l’horizon de sa nageoire. Une vague de nuage noir s’amoncelaient et s’avançaient dans leur direction. Le vent commençait à souffler et la houle gagnait en force. Une tempête s’approchait. Bahati souhaitait rester là où elle était, attendre que la tempête la happe et les flots l’emporte, pour ne faire plus qu’un désormais avec l’élément qui avait régenté sa vie. Son tiplouf, protecteur, s’était rapproché d’elle et la tirait du bras, avec peine. Bahati jeta un dernier regard en direction de la tempête et consentit enfin à revenir sur la plage.

C'est un ◖ Tiplouf ◗ !

◖ Nature ◗ Brave
◖ Niveau ◗ 8
◖ Talent ◗ Acharné
◖ Attaques actuelles ◗ Ecras'Face, Rugissement, Écume

◖ Statistiques◗
PV : 26
Attaque : 14
Défense : 13
Att Sp : 14
Def Sp : 13
Vitesse : 9

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